Boulier népérien

L’abaque de Napier est un abaque inventé par John Napier qui en a publié une description dans un ouvrage imprimé à Édimbourg à la fin de l’année 1617 et intitulé Rhabdologia. Par cette méthode, les produits sont réduits à des opérations d’addition et les quotients à des soustractions ; comme avec les tables de logarithmes, inventées par Napier lui-même, les puissances sont transformées en produits et les racines en divisions.

Description de l’ouvrage

L’abaque est constitué d’un plateau à rebord sur lequel on place les tiges népériennes pour effectuer les opérations de multiplication ou de division. Le bord gauche du plateau est divisé en 9 carrés sur lesquels sont inscrits les chiffres de 1 à 9.

Les baguettes népériennes sont des bandes de bois, de métal ou de carton épais. La face avant est divisée en neuf carrés, à l’exception de celui du haut, qui sont divisés en deux moitiés par une ligne diagonale.

Dans le premier carré de chaque baguette, on écrit le nombre, en remplissant les carrés suivants avec le double, le triple, le quadruple et ainsi de suite jusqu’au zéro du nombre auquel la baguette correspond.

Les chiffres résultant du produit sont écrits un de chaque côté de la diagonale et dans les cas où il est inférieur à 10, ils sont écrits dans la case inférieure, en écrivant un zéro dans la case supérieure.

Un ensemble est constitué de 9 bâtonnets correspondant aux chiffres de 1 à 9. Dans la figure, nous avons également représenté le bâtonnet 0, qui n’est pas vraiment nécessaire pour les calculs.

Avec l’ensemble décrit, supposons que nous voulions calculer le produit du nombre 46785399 par 7.
On place sur le tableau les bâtonnets correspondant au nombre, comme le montre la figure, puis on lit le résultat sur la bande horizontale correspondant au 7 dans la case du tableau, opération qui ne nécessite que de simples additions, bien entendu avec les chiffres placés en diagonale.

En partant de la droite, on obtient les unités (3), les dizaines (6+3=9), les centaines (6+1=7), etc.

Si l’un des chiffres du nombre à multiplier était nul, il suffirait de laisser un espace entre les bâtonnets.

Supposons que nous voulions multiplier le nombre précédent par 96 431 ; en opérant de manière analogue au cas précédent, nous obtiendrons rapidement les produits partiels du nombre par 9, 6, 4, 3 et 1, en les plaçant correctement et en les additionnant, nous obtiendrons le résultat total.

De même, les divisions pourront être effectuées une fois connus les 9 produits partiels du dividende ; une fois ceux-ci déterminés à l’aide de l’abaque, il suffit de choisir celui qui est immédiatement inférieur au reste sans devoir procéder aux fastidieux tâtonnements qu’exigent les divisions effectuées à la main.



Dans l’exemple, la méthode suivante est utilisée pour effectuer l’opération ci-dessus :

Le résultat est donc le suivant (comme on peut le voir dans le tableau) :

Comme on le sait, pour extraire une racine carrée, il faut d’abord regrouper les chiffres deux par deux à partir de la virgule, tant à droite qu’à gauche, ce qui donne le nombre suivant :

… xx xx xx xx xx xx, xx xx xx xx xx xx….



Par exemple : le nombre 458938,34 serait 45 89 38, 34.
En prenant la paire (qui peut être un seul chiffre) de gauche (xx), on obtient l’entier a tel que son carré est inférieur ou égal à la paire. C’est le premier chiffre de la solution. En soustrayant de la paire le carré de l’entier ainsi trouvé, on obtient le reste :

Par la suite, et de manière itérative, la paire suivante est ajoutée au reste, laissant un nombre de la forme yxx (y, le reste précédent, xx la paire ajoutée) que nous appellerons Ra. Le chiffre suivant de la solution doit être tel que le carré de la solution partielle ab (ab étant un nombre à deux chiffres, pas un produit) soit inférieur à xxxx (les deux premières paires du radicande) :

Par compensation :

En opérant de la même manière une fois les chiffres ab connus, il faut déterminer le troisième chiffre de la solution (c) et les suivants (d, e, …) qui, comme on peut facilement le démontrer en opérant de manière analogue au cas précédent, doivent satisfaire :

Les produits indiqués peuvent être facilement obtenus avec l’abaque de Napier, mais il faut pour cela une tige auxiliaire qui recueille dans chaque bande horizontale les carrés des nombres correspondants.



Une fois le premier chiffre a connu, on place sur le boulier la baguette (ou les baguettes) correspondant au double de a. Ceci fait, il suffira d’additionner la tige des carrés pour trouver le nombre tel que l’équation (I) est réalisée, qui sera celui correspondant à la bande b. Ce nombre doit être soustrait de Ra pour trouver Rb.
Une fois b trouvé, on retire la baguette auxiliaire des cases et on place la baguette correspondant à 2-b sur le plateau ; deux cas peuvent se présenter : si b est inférieur à 5, le double n’aura qu’une seule figure, avec laquelle il suffira de placer la baguette ; dans le cas contraire (égal ou supérieur à 5), le double sera supérieur à 10, il faudra donc augmenter d’une unité la dernière baguette placée.

Voyons cela à l’aide d’un exemple. Nous voulons obtenir la racine carrée du nombre 46 78 53 99. Nous prenons la première paire (46) et déterminons le carré immédiatement inférieur, qui s’avère être 36 (49, qui est le suivant est plus grand que 46), de sorte que le premier chiffre de la solution est 6, et le reste : 46 – 6-6 = 46 – 36 = 10.

On place les baguettes de 6-2 = 12 sur le tableau, puis la baguette auxiliaire des carrés. On compose le reste et la paire suivante en obtenant le nombre 1078 qui ne doit pas être dépassé par le carré de (6b). On lit dans l’abaque (1) la valeur 1024, en trouvant que b= 8 et le nouveau reste 1078 – 1024 = 54, en descendant la paire suivante, on obtient une valeur de 545312.

On place les bâtonnets correspondant au double de 8 ; étant 16 (>10), on enlèvera le dernier bâtonnet, celui de 2, qu’on remplacera par celui de 3 (c’est-à-dire qu’on ajoute une unité) et on ajoutera le bâtonnet de 6. Le boulier se présente comme indiqué en (2a). Comme on peut le constater, les nombres placés sont ceux qui correspondent au double de la solution trouvée jusqu’à présent (68-2 = 136), c’est-à-dire les 2abc des équations précédentes.
Une fois cela fait, nous plaçons à nouveau la tige auxiliaire, et en opérant comme dans le cas précédent, nous obtenons (2b) le troisième chiffre : 3, le reste étant 1364. Nous descendons la paire suivante en obtenant une valeur de 136499, nous plaçons la tige 6 (3-2) et nous trouvons le chiffre suivant 9 et le reste 13478. Tant que le reste n’est pas zéro, nous pouvons continuer à obtenir des chiffres significatifs.



Par exemple, pour obtenir la première décimale, nous abaissons la paire 00 pour obtenir le nombre 1347800 et nous plaçons les bâtonnets 9-2 = 18, ce qui laisse au tableau : 1-3-6-7(6+1)-8-auxiliaire. En vérifiant, on obtient la première décimale = 9.

Au cours du 19e siècle, l’abaque népérien a subi une transformation pour en faciliter la lecture. Les tiges ont commencé à être fabriquées avec une inclinaison de l’ordre de 65º, de sorte que les triangles à additionner étaient alignés verticalement. Dans ce cas, chaque carré de la tige est marqué de l’unité à droite et de la dizaine (ou du zéro) à gauche.

Les baguettes étaient fabriquées de telle sorte que la gravure verticale et horizontale était plus visible que les joints entre les baguettes, ce qui facilitait grandement la lecture puisque la paire de composantes de chaque chiffre du résultat se trouvait dans un rectangle.

Ainsi, il apparaît immédiatement sur la figure que :

En plus de l’abaque ci-dessus, Napier a construit un abaque de compteurs. Tous deux réunis en un seul appareil constituent un joyau historique, unique en Europe, qui est en possession du Musée archéologique national espagnol.
L’appareil est une magnifique boîte en bois incrustée d’os. La partie supérieure contient l’abaque rhabdologique, tandis que la partie inférieure contient le second abaque composé de 300 compteurs rangés dans 30 tiroirs, dont 100 sont couverts de chiffres et 200 présentent de petits trous triangulaires qui permettent de ne voir que certains chiffres des compteurs de nombres lorsqu’ils leur sont superposés, de sorte qu’en plaçant habilement l’un ou l’autre, on peut effectuer des multiplications jusqu’à l’étonnante limite d’un nombre de 100 chiffres par un autre de 200.



Les puissances premières des nombres à chiffres, les coefficients des termes des puissances premières du binôme et les données numériques des polyèdres réguliers se trouvent également sur les portes de la boîte.

On ne sait pas qui est l’auteur de ce très riche bijou, ni s’il est espagnol ou s’il vient de l’étranger, bien qu’il soit probable qu’il ait appartenu à l’Académie de mathématiques créée par Philippe II ou qu’il ait été offert par le prince de Galles. La seule chose certaine est qu’il a été conservé au Palais, d’où il est passé à la Bibliothèque nationale et, plus tard, au Musée archéologique national, où il est toujours conservé.
En 1876, le gouvernement espagnol envoya l’appareil à l’exposition d’instruments scientifiques de Kensington, où il attira une attention extraordinaire, au point que plusieurs sociétés consultèrent la représentation espagnole sur l’origine et l’utilisation de l’appareil, ce qui incita M. Felipe Picatoste à rédiger une monographie qui fut ensuite envoyée à toutes les nations, surprenant le fait que l’abaque n’était connu qu’en Angleterre, le pays d’origine de son inventeur.

Bibliographie

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