Sous l’Empire romain

Ravenne

Le Bas-Empire romain est la période historique qui va de l’accession au pouvoir de Dioclétien en 284 à la fin de l’Empire romain d’Occident en 476.

Après les siècles d’or de l’Empire romain (la période dite de la Paix romaine, qui s’étend du Ier au IIe siècle), une dégradation des institutions de l’Empire s’amorce, en particulier celle de l’empereur lui-même. Ainsi, suite à la mauvaise gestion de la dynastie des Sévères, notamment celle d’Héliogabale, et à l’assassinat du dernier d’entre eux, Alexandre Sévère, l’Empire tombe dans un état d’ingouvernabilité connu sous le nom de Crise ou d’Anarchie du IIIe siècle. Entre 238 et 285, 19 empereurs, dont aucun ne meurt de mort naturelle, ne parviennent pas à prendre les rênes du gouvernement et à agir en coordination avec le Sénat, plongeant ainsi Rome dans une véritable crise institutionnelle. C’est au cours de cette même période qu’a commencé ce que l’on appelle « l’invasion pacifique », au cours de laquelle diverses tribus barbares se sont d’abord installées aux frontières de l’empire en raison du manque de discipline de l’armée et de l’ingouvernabilité du pouvoir central, incapable d’agir face à cette situation.
Parallèlement à cette crise politique, une profonde crise économique s’est développée, caractérisée par une forte inflation et un déclin de l’agriculture, de l’industrie, du commerce, des zones urbaines et du système esclavagiste. Les périodes au cours desquelles on a tenté de rétablir l’ordre, comme le IVe siècle du Dominat, ont introduit des changements politiques et économiques très importants dans l’administration et le gouvernement de l’Empire, comme l’établissement de la tétrarchie, puis la division territoriale de l’Empire en Empire romain d’Occident, dont le déclin est étudié ici, et en Empire romain d’Orient, qui devait survivre pendant encore 1000 ans. Cependant, l’événement le plus marquant de cette période d’instabilité est constitué par les invasions dites barbares, au cours desquelles les barbares venus du nord s’infiltrent progressivement à travers les frontières de l’Empire, dans une succession de guerres frontalières et d’invasions qui finiront par détruire l’Empire : les frontières impériales, privées de leur vigilance d’antan, deviennent de véritables portes par lesquelles les tribus barbares pénètrent en toute impunité. Les plus audacieux sont les peuples germaniques, notamment les Francs et les Goths, qui attaquent l’empire en franchissant les frontières du Rhin et du Danube, jusqu’à ce qu’il s’effondre.
Selon la tradition occidentale, l’Empire romain a disparu en tant qu’entité politique le 4 septembre 476, lorsque Romulus Augustule, empereur d’Occident, a été déposé par Odoacer. Rome avait été mise à sac par Alaric Ier en 410, et il ne restait pratiquement plus rien de l’ordre romain originel ; Romulus Augustule ne régnait même pas sur tous les territoires qui avaient appartenu à l’Empire d’Occident, et ses prétentions au trône étaient contestées par l’empereur Jules Népos, considéré comme le souverain légitime par Constantinople.

Traditionnellement, l’année 476 est considérée comme la date qui marque définitivement la chute de l’Empire romain et le début du Moyen Âge, parce qu’à partir de cette date, plus personne ne revendique le titre d’empereur d’Occident et parce que, avec la chute de Rome elle-même, il est paradoxal que l’Empire romain puisse continuer à exister. Cependant, de nombreux historiens remettent en question cette date, en notant que l’Empire romain d’Orient a survécu jusqu’à la chute de Constantinople le 29 mai 1453, qui est à son tour considérée comme la fin du Moyen-Âge et le début de la Renaissance.

La crise du IIIe siècle

Au IIIe siècle, l’étendue de l’Empire rend les communications très lentes et difficiles : malgré l’excellente structure routière, les voies romaines et le système des postes, les messagers impériaux ne peuvent espérer effectuer des trajets tels que Rome-Antioche ou Rome-Londres qu’en plus d’une semaine. Ces moyens ne garantissaient pas la loyauté des armées frontalières : les armées des provinces frontalières incorporaient les populations locales et de solides liens de loyauté s’établissaient entre les troupes et leurs commandants, qui, forts de cette source de pouvoir, pouvaient aspirer à devenir empereurs de l’Empire si l’occasion s’en présentait.

Après une période chaotique de conspirations et de crises institutionnelles qui minent les institutions les plus fondamentales de l’Empire, comme le Sénat et la magistrature, l’assassinat d’Alexandre Sévère par ses troupes en 235 marque le début d’une période de crise : tant en Italie que dans les provinces, des pouvoirs éphémères sans base légale voient le jour, tandis que la vie économique est marquée par l’incertitude de la production, la difficulté croissante des transports et l’effondrement du système monétaire.

Deux sous-périodes ont été distinguées à partir de cette période. La première est la période d’anarchie militaire (235-268), caractérisée par le fait que les armées provinciales et la garde prétorienne se sont souvent rebellées, soit pour déposer les empereurs, soit pour élever leurs commandants à la dignité impériale.
De plus, durant cette période, la protection des frontières est négligée et des peuples barbares en profitent pour envahir l’Empire romain encore riche. Famines, épidémies et insécurité s’emparent de l’Empire, qui se ruralise peu à peu.

Sous le principat de Gallien, la situation devient tellement incontrôlable que plusieurs provinces de l’Ouest et de l’Est se séparent pour former respectivement l’Empire gaulois et l’Empire de Palmyre, afin de tenter de faire face par leurs propres moyens aux dangers extérieurs qui menacent l’Empire.

La deuxième période est celle des empereurs illyriens (268-84). Après les années précédentes d’anarchie militaire, au cours desquelles la sécurité et l’unité de l’Empire avaient été sérieusement compromises, différents empereurs d’origine illyrienne et danubienne, tous issus de provinces frontalières où ils avaient été formés comme généraux et avaient combattu les barbares, parvinrent à réunifier l’Empire et à jeter les bases d’un rétablissement de la situation : l’empereur Claude II fut le premier d’entre eux et, bien qu’il soit mort de la peste, il marqua un tournant dans la dynamique de crise qui avait précédé. Son successeur Aurélien reconquiert une grande partie de l’empire, mettant fin, entre autres, au royaume de Palmyre et à l’empire de Gaule.
La situation économique de l’Empire à la fin du IIIe siècle est critique. Les invasions et les abus des grands propriétaires terriens, libres de tout gouvernement capable de les contenir, entraînent l’abandon des campagnes par les paysans à la recherche d’occupations plus prometteuses comme le brigandage, ce qui se traduit par une insécurité croissante de l’environnement interurbain et un déclin du commerce terrestre.

Le système monétaire a également été affaibli. Le fonctionnement de la monnaie antique reposait sur le fait que la valeur de la pièce était celle du métal qu’elle contenait, mais en période de crise, la qualité de la pièce était souvent abaissée par l’ajout d’un métal de qualité inférieure, sans que sa valeur faciale ne soit diminuée. À l’époque de Néron, les deniers d’argent étaient émis avec une pureté de 90 %. Marc Aurèle a émis des pièces d’argent contenant 75 % de métal noble et Septime Sévère 50 %, tout cela pour faire face à l’augmentation des dépenses militaires.
Au IIIe siècle, l’Empire avait cessé son expansion et l’État ne pouvait plus compter sur les richesses tirées des conquêtes militaires. Cette situation a entraîné une réduction alarmante de l’offre de métaux précieux, combinée à des dépenses publiques très élevées. Ces aspects ont contraint les empereurs à émettre des pièces d’argent de faible valeur pour répondre à leurs besoins. Le peuple s’est rendu compte que les pièces étaient fortement surévaluées par rapport à leur teneur en métal. La valeur des pièces diminuait à mesure que les prix augmentaient en raison de l’inflation causée par l’augmentation de l’argent en circulation, ce qui entraînait une spirale inflationniste, les pièces fortement dévaluées entraînant des prix encore plus élevés. En outre, Rome achetait des produits de luxe à l’Orient et ne vendait que des céréales et d’autres denrées alimentaires, de sorte que la balance commerciale de l’Empire d’Occident était négative.



À l’époque de Gallien, le pourcentage de pureté des pièces d’argent était tombé à 5 %. Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que le gouvernement émette des pièces de cuivre plaquées argent.

Une autre victime de l’inflation fut l’État lui-même, car la perception des impôts augmentait en valeur réelle alors que les recettes étaient insuffisantes pour payer les fonctionnaires et les soldats ; il fut donc décidé de les payer en nourriture, un système qui devint le système fiscal normal de l’Empire tardif et qui se poursuivit jusqu’au Moyen Âge.

Dioclétien et la tétrarchie

Dioclétien est proclamé empereur en 284 à Nicomédie, qui deviendra plus tard la capitale de l’Empire. En 286, il promeut Maximien au rang de César, qu’il nomme Auguste quelques années plus tard en lui donnant la partie occidentale de l’Empire. L’Empire est ainsi divisé entre l’Ouest et l’Est.

Le 1er mars 293, deux fonctionnaires illyriens, Galère et Constance Ier, sont nommés césars. Une nouvelle forme de gouvernement est ainsi instituée : la tétrarchie, dans laquelle les deux Augustes règnent pendant 20 ans en Orient et en Occident, chacun ayant un César comme lieutenant ; au terme des 20 ans, les Césars montent sur le trône en tant qu’Augustes et nomment deux autres Césars, tandis que les Augusti se retirent de la vie publique.



Le partage du pouvoir donne dans un premier temps des résultats très satisfaisants. Galère repousse les Goths sur le bas Danube et, entre 297 et 298, remporte une victoire spectaculaire contre les Perses dans les guerres romano-sassanides et parvient à étendre la frontière romaine jusqu’au haut Tigre, au Kurdistan et au Sinagre. Entre-temps, Dioclétien réprime une révolte en Égypte et Constance Ier reprend la Bretagne à l’usurpateur Alexis et remporte plusieurs victoires sur les frontières rhénanes. Maximien, quant à lui, écrase une insurrection indigène en Mauritanie.

Cependant, malgré le succès militaire du système, l’instauration de la tétrarchie entraîne une série de réformes administratives et économiques profondes qui affecteront (et grèveront) l’Empire pour le reste de son existence.
Sous le règne de Dioclétien et de ses successeurs, une série de réformes militaires ont été mises en œuvre pour assurer le contrôle et l’efficacité des armées. En voici quelques-unes :

Dans un premier temps, les tétrarques ne parviennent pas à enrayer l’inflation, mais, en combinant une série de mesures économiques, ils parviennent à la contenir et laissent à leurs successeurs un système monétaire partiellement stable. À cette fin, ils entreprirent une série de réformes profondes du système monétaire, la plus importante étant la création d’une nouvelle monnaie d’or, frappée avec un haut niveau de pureté, avec une dévaluation de 1/5 de sa valeur. Des pièces d’argent ont également été frappées selon un nouvel étalon qui a réussi à maintenir leur valeur, ainsi que d’autres pièces de cuivre qui, étant d’usage quotidien et faites d’un métal utile, étaient sujettes à une inflation continue.
Comme dans toute l’Antiquité, la monnaie de base du peuple romain n’était pas la pièce d’or ou d’argent, réservée aux grandes transactions et donc hors de la circulation courante, mais la partition de bronze ou de cuivre, plus petite. Les pièces d’or et d’argent échappent en effet au système monétaire en vigueur et les mesures monétaires adoptées à leur égard n’affectent guère la vie quotidienne : la rareté ou la stabilité des aureos d’or ou des tétradrachmes d’argent n’a jamais affecté les petites économies de l’empire. Cependant, les politiques monétaires de la tétrarchie n’ont pas été en mesure de garantir la stabilité de la monnaie de cuivre, de sorte que le résultat des réformes a été une inflation continue (bien que moins importante qu’au IIIe siècle) des prix des biens de consommation, qui étaient exprimés dans la monnaie de cuivre d’usage courant. Les plaintes de l’armée, qui recevait sa solde dans cette monnaie, ont contraint Dioclétien à promulguer l’Édit des prix pour tenter de fixer des prix maximums pour divers biens de base et de fixer les salaires (y compris la prostitution, afin que les légions ne soient pas privées de ce service naturel). Un contemporain de l’époque, Lactance, avait prédit que l’édit échouerait parce que les biens ne pourraient pas atteindre le marché : en effet, les marchands retenaient les biens de consommation et les proposaient à la vente au marché noir, à un prix plus élevé.
En 305, les augustes Dioclétien et Maximien abdiquent, plus par la volonté de Dioclétien que par celle de Maximien, apparemment peu enclin à renoncer au pouvoir. Ils sont remplacés par Galère à l’Est et Constance Ier à l’Ouest. Dans le même temps, Maximin et Sévère II, jusqu’alors peu connus, deviennent césars. Cela met en péril la fidélité et la cohérence de la politique de Dioclétien, car cela exclut Maxence, fils de l’Auguste Maximien en retraite, et Constantin Ier, fils de Constance Ier en ascension, de la possibilité d’accéder au pouvoir impérial.

L’essor du christianisme

Au cours des IIe et IIIe siècles, l’Empire connaît de grands changements religieux. De nouvelles formes de culte sont adoptées à partir de la culture gréco-orientale. En Égypte, le culte d’Isis et de Sérapis prend de l’importance, remplaçant celui des anciens dieux égyptiens, dont seul le culte d’Osiris a survécu ; en Judée, le christianisme apparaît, d’abord comme une secte juive, puis comme une religion distincte ; en Syrie et en Mésopotamie, diverses formes de gnosticisme sont adoptées, et plus tard le mithraïsme et le manichéisme.

La prévalence de ces cultes a été liée à la crise du IIIe siècle. Le désordre et l’insécurité de l’époque auraient conduit à un repli sur soi. En outre, l’échec de la religion officielle, étroitement liée au gouvernement discrédité de l’empire et incapable de résoudre les problèmes du peuple, a conduit de nombreuses personnes à se tourner vers des religions qui promettaient une vie meilleure au-delà de la terre.
Bien qu’il soit d’abord resté un culte très minoritaire, au cours des IIe et IIIe siècles, le christianisme, avec son message nouveau dans le panorama religieux de l’empire, a progressivement gagné des adeptes, en particulier dans les provinces orientales de l’empire, en Afrique et dans certaines zones côtières occidentales de la Méditerranée, généralement dans des villes où la présence juive était également importante.



Les persécutions du christianisme ne doivent pas être comprises comme une « chasse aux chrétiens », au cours de laquelle les Romains auraient exterminé et assassiné tous les chrétiens qu’ils rencontraient, mais comme une mise hors la loi des pratiques chrétiennes, qui, même si elles ont parfois donné lieu à des exécutions sommaires, correspondaient généralement davantage à une marginalisation du culte chrétien et à l’obligation inconfortable d’adorer le dieu chrétien en secret. Comme dans de nombreuses périodes de crise, il est arrivé, au cours des IIe et IIIe siècles, qu’un groupe minoritaire soit rendu responsable de tous les malheurs, en l’occurrence les chrétiens. Ils étaient en dehors du culte impérial et de la vie religieuse quotidienne de l’empire, et on disait que c’étaient eux qui ruinaient les relations entre les hommes et les divinités, et qui troublaient la paix des dieux, provoquant leur retrait et les malheurs qui s’ensuivaient.
Bien qu’il y ait des antécédents, comme lorsque Néron les a accusés de l’incendie fortuit de Rome, la tradition de l’Église catholique fait remonter le début de la persécution des chrétiens au principat de l’empereur Dèce. À cette époque, le christianisme était une religion suffisamment importante et suffisamment différente pour être considérée comme la cause de tous les maux. Il semble que sous Dèce, il y ait eu une grave crise militaire, surtout après les premières invasions gothiques. Dèce a donc ressenti le besoin de réaffirmer la loyauté traditionnelle de l’Empire romain envers ses dieux et a exigé que tous les habitants de l’Empire leur manifestent leur soumission. Les chrétiens qui refusaient pouvaient dans certains cas être exécutés. On a beaucoup écrit sur la question de savoir si Dèce avait ordonné une attaque directe contre le christianisme ou si, au contraire, les chrétiens étaient les victimes d’une politique moins spécifique et plus générale. Quoi qu’il en soit, il semble certain que les victimes n’ont pas été aussi nombreuses que l’affirment les sources chrétiennes (à moins qu’elles n’aient menti sur le nombre de chrétiens). À la mort de Dèce, les persécutions cessèrent, bien que pendant une brève période du principat de Valérien (jusqu’à ce qu’il soit capturé par les Perses en 260), elles semblèrent reprendre, coïncidant à nouveau avec la nécessité de réaffirmer le culte impérial.
La principale persécution subie par les chrétiens a toutefois été celle qui a eu lieu sous le règne de Dioclétien. Dans ce cas, il est certain qu’il s’agissait d’une politique totalement opposée au christianisme. Bien que sous son règne la situation politico-militaire n’ait pas été critique, la nécessité de réunifier la religion romaine meurtrie et le désir de Dioclétien de restaurer la dignité du culte impérial et traditionnel se sont heurtés au nombre croissant de chrétiens qui, en s’opposant aux prétentions impériales, ont été déclarés ennemis du trône impérial. Une explication plus traditionnelle, peut-être fausse, affirme que pour une raison quelconque, Galère détestait le christianisme et qu’il réussit à imposer son attitude à Dioclétien, âgé et affaibli.

La persécution générale fut déclenchée par l’échec d’un sacrifice à Nicomédie : les haruspices ne trouvèrent pas les foies de plusieurs animaux sacrifiés, un très mauvais présage dont ils rendirent responsable, semble-t-il, un fonctionnaire impérial présent, que l’on vit se sanctifier pour ne pas être contaminé par les rites.

Le premier édit de persécution, publié le 23 février 303, ordonne la fermeture des églises et la remise des écritures ; il est suivi d’une injonction au clergé chrétien d’accomplir des sacrifices aux dieux traditionnels. Jusqu’à présent, seules les autorités ecclésiastiques étaient donc concernées, mais un autre édit a étendu l’obligation de sacrifier à tous les membres de la communauté chrétienne.
Après l’abdication de Dioclétien, la persécution se poursuit sous Galère, mais s’atténue dans les régions dominées par Constantin Ier (Gaule et Grande-Bretagne, où les chrétiens sont très peu nombreux) et celles dominées par Maxence (Italie et Afrique, où il n’est pas particulièrement nécessaire de recourir à la persécution pour renforcer le pouvoir impérial).

À la fin du règne de Galère, la persécution a perdu de sa force : on s’est aperçu qu’en interdisant la prière à leur Dieu, ils ne priaient pas non plus les dieux païens, de sorte que l’échec de la mesure était évident. La liberté de culte est donc rétablie et les chrétiens sont invités à prier leur Dieu pour le salut de leur âme et de l’Empire.



À la mort de Galère, son neveu Maximin lui succède et reprend la persécution. On dit qu’il reçut des délégations des villes demandant la poursuite de la persécution des chrétiens, et qu’il la reprit donc. À l’origine de tout cela se trouve peut-être le désir de confisquer les biens détenus par les chrétiens. À la mort de Maximinus, Licinius lui succéda et inversa la politique à l’égard du christianisme. En 313, Constantin Ier et Licinius publient l’édit de Milan, une déclaration de liberté de culte qui restitue tous les biens confisqués aux temples chrétiens. À l’époque de l’édit, on estime que 7 millions des 50 millions d’habitants de l’empire professent le christianisme, ce qui constitue le premier pas vers la paix avec l’Église et la conversion de l’Empire romain au christianisme.
Les persécutions des chrétiens sont traditionnellement teintées d’un parti pris très partiel en faveur des chrétiens, car ce sont eux qui ont écrit toute l’histoire ultérieure. L’imagerie populaire les a donc perçues comme une série de massacres de chrétiens, au cours desquels, si l’on en croit les chiffres fournis par les sources chrétiennes, deux empires romains auraient pu périr, tant l’exagération est grande. En résumé, sur les persécutions des chrétiens, on peut dire que, sans aucun doute, tous les chiffres de martyrs et de victimes donnés par les historiens chrétiens postérieurs sont le fruit de l’exagération la plus intéressée : certains chiffres de victimes dépassent même l’estimation réelle de la population de l’Empire. Des historiens plus sérieux, comme Edward Gibbon, ont en effet suggéré que les persécutions ultérieures entre les différentes sectes chrétiennes, ou les campagnes militaires de Charles Quint, ont fait plus de victimes que celles menées par le pouvoir central, un peu dans la lignée de la célèbre remarque de Julien l’Apostat qui ne persécutait pas les chrétiens car ils étaient suffisamment efficaces pour se persécuter les uns les autres. En outre, les persécutions chrétiennes ne sont pas considérées comme ayant eu en leur temps, et pour le gouvernement et le peuple en général, l’importance que l’historiographie ultérieure, aux mains des chrétiens, leur a donnée : on parle d’épisodes de persécution sporadiques, non systématiques et très inefficaces, avec peu de victimes, plus proches d’un pogrom, dans lequel les chrétiens ont été utilisés comme boucs émissaires pour les maux publics qui affligeaient l’Empire.

Constantin le Grand

En 305, Constantin, qui réside toujours en Orient, obtient de Galère la permission de rejoindre en Grande-Bretagne son père Constance, qui meurt l’année suivante à Eburachus, aujourd’hui York. Constantin est proclamé Auguste par l’armée, bien qu’il ne revendique initialement que le titre de César auprès de Galère. Constantin se lance immédiatement dans une série de guerres civiles violentes qui, en 324, font de lui le seul maître de l’Empire romain d’Occident.

En Orient, Galère est mort et son successeur, Licinius, partage le trône avec Maximinus. Constantin et Licinius se rencontrent à Milan et, outre la promulgation de l’édit de Milan, s’accordent sur la paix entre l’Orient et l’Occident, que les actions de Constantin avaient rompue. Peu après, Licinius, devenu l’ennemi de Maximinus, le bat à la bataille de Byzance et devient empereur d’Orient. La paix dure jusqu’en 316, date à laquelle Constantin s’empare des Balkans, territoire appartenant à Licinius. En 324, Constantin se retourne contre Licinius, qu’il bat à Adrianople et à Chrysopolis. Dès lors, il est le seul maître de l’Empire romain et nomme ses fils Constantin, Constance et Constance César.

L’ascension de Constantin est étroitement liée à la conversion religieuse au christianisme. La conversion de Constantin au christianisme peut être expliquée en quatre phases, qui relèvent plus du domaine de la légende que de la réalité :
Les changements religieux s’accentuent dans la partie orientale de l’Empire, notamment dans la ville de Constantinople, fondée par Constantin. L’empereur se rendit à Rome en 315 et 326 ; à cette dernière occasion, Constantin offensa le Sénat et la population romaine en refusant d’assister à un sacrifice sur la colline du Capitole. La rupture avec l’ancienne ville fut suivie par la promotion délibérée de la nouvelle Constantinople, déplaçant le centre de gravité de l’Empire vers l’Orient, beaucoup plus riche et plus stable.

Le célèbre édit de Milan de 313 proclame la liberté de culte, donnant aux chrétiens la visibilité publique qui leur faisait défaut jusqu’alors. Constantin ne s’est cependant pas converti au christianisme et ne l’a pas non plus imposé par la loi. On raconte en effet que, pour éviter d’être condamné à l’enfer pour ses nombreux crimes, il a cru qu’en se convertissant sur son lit de mort, le baptême laverait ses péchés, garantissant le salut de son âme : il aurait été baptisé par l’arien Eusèbe de Nicomédie sur son lit de mort, ce que ses successeurs allaient imiter.
Néanmoins, à l’époque de Constantin et tout au long du IVe siècle, la cour impériale a donné une impulsion décisive au processus de christianisation de l’Empire. À une époque de profonde crise sociale et institutionnelle, le christianisme était considéré comme un élément capable de réunifier la société de l’Empire, tout en servant, de facto, d’élément de contrôle et de répression des éléments socialement subversifs. En ce sens, il devenait nécessaire d’unifier la doctrine chrétienne, ce que Constantin encouragea avec le concile de Nicée : jusqu’alors, les communautés chrétiennes étaient relativement indépendantes, chacune d’entre elles conservant diverses particularités doctrinales et liturgiques qu’il n’était pas dans leur intérêt de maintenir. Cet empressement s’est avéré être l’une des principales sources de conflit au cours des siècles suivants, lorsque les différentes hérésies (arianisme, nestorianisme, monophysisme, iconoclasme) ont été persécutées avec virulence.



La conversion, bien qu’elle soit en soi un événement personnel et imperceptible, n’a pas exercé son influence dans le vide, mais dans un environnement où le christianisme allait devenir la principale religion de l’empire, puis définitivement officielle avec l’édit de Théodose.

Constantin, tout au long de son règne, entreprend de réformer profondément l’Empire. Il modifie la composition du Sénat, dont le conseil était auparavant composé de 600 magistrats, en portant son nombre à 2000 membres, et introduit de nombreux équites, qui constituent le noyau du personnel administratif de l’Empire.
Une autre innovation est la réforme de la préfecture du prétoire : les commandants de la garde impériale deviennent de hauts fonctionnaires provinciaux dotés de larges pouvoirs civils, chargés du maintien de l’ordre public et des finances.

L’armée est réorganisée et hiérarchisée au profit des comitatus, unités mobiles stationnées dans les villes proches des frontières et limitées à quelques centaines d’hommes. Au sein de la Garde impériale, et pour remplacer les prétoriens, dissous en 312 pour avoir soutenu Maxence, Constantin crée les Scholae Palatinae, composés de soldats recrutés parmi les Germains. De nombreux privilèges sont accordés aux vétérans, soldats ayant accompli leur service : ils bénéficient de l’immunité fiscale et de l’exemption des charges municipales.



Dans le domaine économique et afin de contrôler l’inflation, Constantin crée une nouvelle pièce d’or, le solidus, frappé pour la première fois en 310, qui stabilise rapidement le système monétaire. Toutefois, il s’agit d’une pièce en métal précieux qui ne circule que parmi les classes sociales les plus aisées et non parmi les pauvres, qui continuent d’utiliser une pièce en alliage cuivre-argent dévaluée. Mais la ruralisation croissante de l’empire favorise le troc au quotidien dans les classes populaires et une certaine stabilité est finalement atteinte avec des pièces de moindre valeur.
Constantin meurt en 337, son corps est transporté à Constantinople et enterré dans l’église des Saints Apôtres. Constantin avait de nombreux demi-frères et neveux qui furent tués par de puissants politiciens et généraux désireux de défendre une succession dynastique ordonnée, exempte de conflits entre les différentes branches de la famille. C’est ainsi que les fils de Constantin devinrent Auguste : Constantin II de Gaule, d’Hispanie et de Grande-Bretagne, Constance II d’Orient et Constance d’Italie et d’Afrique.

Constantin II est assassiné par Constance, qui est à son tour renversé en 350 par un usurpateur militaire, Magnence. Ce dernier est vaincu par Constance aux batailles de Mursa Major et de Mons Seleucus, et devient le seul maître de l’empire.

Au début de son règne, Constance II doit faire face aux nouvelles hostilités des Germains, dont les provinces occidentales requièrent l’autorité d’un souverain distinct, doté d’un pouvoir local. L’empereur nomme Julien II césar de Gaule, avec l’intention que le nouveau césar exerce un contrôle nominal sur les guerres germaniques. Julien acquiesce d’abord et remporte une grande victoire sur les Alamans près de Strasbourg en 357 ; mais au fil du temps, il affirme sa personnalité avec plus de force.
Après avoir visité Rome en 357, Constance retourne en Orient pour arrêter une armée perse qui a envahi la Mésopotamie. Ayant besoin de renforcer son armée, il demande l’aide de Julien, qui refuse et se proclame Auguste d’Occident. En 361, Julien marche vers l’Orient contre Constance. La guerre civile est évitée car l’empereur meurt à l’âge de 43 ans.

Le règne de Julien, le dernier de la maison de Constantin, fut court, mais l’un des plus actifs et des plus controversés. Voici quelques-uns de ses actes :

Le successeur de Julien est Jovien, proclamé par l’armée en Mésopotamie en 363 lors de la crise qui suit la mort de Julien au combat. Afin d’assurer le départ de l’armée des territoires perses, Jovien leur cède des territoires dans le nord de la Mésopotamie ; cette action est critiquée dans la même mesure que son prédécesseur. Contrairement à Julien, Jovien est un chrétien apparemment modéré, mais il meurt en 364 avant d’avoir pu mettre en œuvre sa politique.
Un autre officier succède à Jovianus, Valentinien Ier, nommé par une chambre politique composée d’officiers militaires et de fonctionnaires de haut rang et accepté par l’armée. Valentinien se rend compte de la nécessité de diviser l’Empire et choisit son frère Valens comme gouverneur de la moitié orientale. Entre 364 et 365, les empereurs se répartissent les provinces, l’armée et l’administration. Le règne de Valentinien se concentre sur la défense militaire des frontières du Rhin et du Danube contre les invasions barbares. L’empereur entreprend un programme systématique de construction défensive, tant le long des fleuves que le long des voies de pénétration dans les provinces romaines. Son administration générale se caractérise par la rigueur, la minutie et la brutalité. Ce style de gouvernement lui vaut des rébellions en Illyrie et en Afrique, qui sont réprimées par le général Flavius Theodosius. Valentinien meurt en 375 d’une apoplexie.
Valentinien partage le pouvoir avec son frère Valens, qui prend en charge la moitié orientale. Son règne est marqué par des guerres à l’étranger contre les Goths, qu’il attaque avec succès entre 367 et 369, et contre l’Empire perse en Arménie. La crise du règne de Valens survient en 376, lorsque l’empereur est persuadé de laisser entrer dans l’Empire les Wisigoths, qui ont été repoussés aux frontières romaines par l’invasion des Huns. Mais les Goths sont entrés violemment, poussant l’armée romaine à les combattre. En 378, Valens les affronte à Adrianople. Il perd la bataille, est tué et les deux tiers de son armée sont détruits.

Constantinople

La ville de Constantinople a été construite par Constantin entre 330 et 336 sur le site de Byzance. Elle est surnommée la Nouvelle Rome car elle ressemble beaucoup à la capitale impériale. Comme la capitale impériale, elle est construite sur sept collines, divisée en quatorze quartiers urbains, avec un forum, un capitole et un sénat.
Dès ses débuts, Constantinople s’est développée avec une rapidité étonnante et la richesse de ses ressources a attiré un grand nombre d’artisans et de matériaux en provenance de toutes les régions de l’Orient. Dans le contexte général du Bas-Empire, la ville était un point de rencontre entre l’Orient et l’Occident. La ville était caractérisée comme étant très chrétienne, sans temples païens et avec un grand nombre d’églises chrétiennes.
Constantinople était ornée de places monumentales et de beaux bâtiments publics. La ville comptait 14 églises, 11 palais, 5 marchés, 8 bains publics, 153 bains privés, 20 boulangeries publiques, 120 boulangeries privées, 52 portiques, 322 rues et 4388 maisons.

Rome impériale tardive

Après la conversion de Constantin, Rome devient un grand centre de la culture chrétienne. En l’absence des empereurs retirés dans leur Nouvelle Rome, le Sénat et le peuple romain s’installent sans complexe, comme ils ne l’avaient pas fait depuis la fin de la République romaine. Cependant, son pouvoir est limité à la zone d’influence géographique la plus proche de Rome (le Latium, la Toscane et la Campanie), et elle devient une puissance provinciale plutôt que mondiale : le déplacement du centre de gravité de l’empire vers l’Est rend Rome moins pertinente au sein de son propre empire.

Parallèlement à sa transformation en ville chrétienne, Rome connaît un renouveau de la culture classique, dans les domaines de la littérature, de la peinture, de la sculpture et de l’architecture, avec la construction de nombreuses églises.

Théodose Ier le Grand

Dans la crise, Théodose, fils du général Flavius Théodose de Valentinien, est prié de quitter ses fonctions en Hispanie et est nommé empereur d’Orient en janvier 379. Ses premières années de règne sont consacrées au problème des Goths. En 382, il signe un traité d’alliance en vertu duquel les Goths peuvent entrer sur le territoire de la Messénie, mais doivent être intégrés dans l’armée romaine en tant que fédérés. Théodose établit également un traité avec les Perses en 386.

En Occident, Valentinien est remplacé par ses fils Gratien et Valentinien II, alors âgés respectivement de 16 et 4 ans. Tous deux sont contrôlés par leurs conseillers et Valentinien par sa mère. Ces gouvernements n’étant pas assez forts, l’usurpateur Magnus Clement Maximus assassine Gratien à Lyon et installe sa cour à Trèves dans l’espoir que Théodose Ier reconnaisse son pouvoir. En 387, il envahit l’Italie et détrône Valentinien II, qui se réfugie auprès de Théodose. En réponse, l’empereur d’Orient marche contre Maximus en 388, le tue et rétablit Valentinien au pouvoir.

De retour à Constantinople, Théodose laisse Valentinien à Trèves sous la surveillance d’un général franc, Arbogastus. L’année suivante, Valentinien est retrouvé pendu, soi-disant par suicide, et Arbogastus élève Flavius Eugenius à la pourpre impériale. Théodose réagit et remporte la victoire avec ses troupes à la bataille de Frigidus, à l’est d’Aquilée. Théodose retourne à Milan et y installe sa cour.
Plusieurs empereurs précédents, comme Constantin, étaient chrétiens. À partir de 313, avec l’édit de Milan, la liberté de culte est assurée. Mais le 28 février 380, Théodose publie un édit déclarant le christianisme nicéen religion officielle de l’Empire romain, respectant le culte traditionnel tant qu’il n’y a pas de sacrifices, et interdisant les sectes chrétiennes qui n’acceptent pas le Credo de Nicée.

Société du Bas-Empire

La structure administrative du Bas-Empire est dirigée par l’empereur. Il y avait généralement deux ou plusieurs empereurs collégiaux qui gouvernaient indépendamment, tout en maintenant un front uni.

À partir de l’époque de Dioclétien, l’administration est strictement divisée en fonctions militaires et civiles. Les armées mobiles de campagne, en Orient et en Occident, étaient commandées par des magistri, ou maîtres de la cavalerie et de l’infanterie. Au-dessous d’eux, les comites et les ducs commandaient les armées régionales. Le Comes Domesticorum commandait l’élite de la garde du palais, divisée en cavaliers et fantassins. Le Castrensis était chargé de maintenir l’ordre dans le palais, une tâche difficile compte tenu de la mobilité constante des derniers empereurs romains.
À la tête de l’administration civile se trouvent les préfets prétoriens d’Italie (avec l’Afrique et l’Illyrie), de Gaule (avec l’Hispanie et la Bretagne) et d’Orient. Ils sont chargés de l’administration des provinces, en particulier de la perception des impôts. Le comte des dons sacrés contrôlait les monnaies et les mines de l’État. Un autre fonctionnaire important était le comte de la bourse impériale, qui était chargé de l’administration des biens de l’État. Le questeur du palais sacré était chargé des relations et des communications impériales sous une forme littéraire appropriée et, enfin, le Primicerius Notariorum dirigeait le corps des secrétaires impériaux.

Le travail des esclaves était à la base de l’économie romaine. Mais à partir du IIIe siècle, l’influence du christianisme, la suspension de l’approvisionnement en main-d’œuvre due à la fin des conquêtes, la crainte des soulèvements et les tentatives constantes d’évasion et de sabotage ont convaincu les propriétaires de la nécessité de mettre en œuvre de nouvelles formes de travail. Nombre d’entre eux ont commencé à libérer leurs esclaves et leur ont donné un lopin de terre en échange d’une part de la production.
Lors de la crise du IIIe siècle, ce processus s’est accéléré. De nombreux paysans libres, qui ne pouvaient ni payer les impôts croissants ni empêcher le pillage de leurs champs, abandonnèrent leurs terres et se mirent sous la protection des grands propriétaires ruraux. C’est ainsi qu’est né le colonat. Le colon est un métayer qui cultive une parcelle de terre et doit remettre une partie de la récolte au propriétaire. De nombreux citadins se sont installés à la campagne et sont devenus des colons.

L’essor du colonat et la ruralisation de la société après la crise du IIIe siècle ont donné naissance à une nouvelle structure sociale plus polarisée. Au sommet de la pyramide sociale se trouvaient les grands propriétaires terriens qui, outre leurs terres et leurs domaines fortifiés, possédaient des armées privées et percevaient des impôts sur leurs territoires. Au-dessous d’eux se trouvaient les paysans indépendants appauvris, les colons et les esclaves. Progressivement, la condition des colons s’est dégradée, jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus quitter les terres qu’ils travaillaient, en raison de la réforme de Dioclétien qui, pour parvenir à une comptabilité exacte des impôts, obligeait les travailleurs à rester sur les parcelles qu’ils cultivaient et à les défendre (ce qui allait donner naissance à la stratiota (grec : στρατιώτης, stratiótēs) ou soldat-colonisateur). Cela a donné naissance à des processus économiques et sociaux qui seront repris dans les siècles suivants, comme la féodalité.

Problèmes internes

Théodose Ier meurt à Milan en janvier 395 d’une maladie cardiaque. Il est le dernier empereur qui, pendant plus d’un demi-siècle, a exercé un contrôle durable sur l’Empire romain grâce à ses compétences personnelles et à sa force de caractère. À sa mort, il laisse le pouvoir à ses fils Arcadius, qui règne à Constantinople, et Honorius, qui siège à Milan. Au moment de son avènement, Arcadius a 18 ans et quelques années de plus que son frère. Ni l’un ni l’autre n’avait beaucoup de personnalité, mais la succession s’est déroulée sans résistance.

Arcadius meurt en 408 et son fils Théodose II, proclamé co-auguste en 402 à l’âge d’un an, lui succède. En 423, Honorius mourut après un règne sans activité. Entre 423 et 425, Flavius Castinus fait de l’usurpateur Jean l’empereur d’Occident. Théodose II proclame cependant Valentinien III, âgé de quatre ans, empereur d’Orient et le général Flavius Aetius magister militum d’Occident.

La stabilité dynastique de la fonction impériale au cours de cette période a été assurée au prix de la présentation à l’Empire de très jeunes empereurs dirigés par des ministres et des généraux. Cette continuité dynastique créée par l’héritage de Théodose Ier n’a pas empêché les habituelles rivalités politiques entre les partisans des empereurs, mais elle a été importante en ces temps extrêmement difficiles pour l’Empire romain.

Invasions barbares

Les peuples germaniques d’Europe du Nord et de l’Est étaient de langue indo-européenne. Ils habitaient des terres pauvres, couvertes de forêts et de marécages, ce qui rendait les pratiques agricoles difficiles.

Bien que Rome ait rarement pu franchir la frontière séparant l’espace romain de l’espace germanique, elle a longtemps été en contact avec les Germains et les a admis sur son sol. Cette ligne de démarcation longe le Rhin et le Danube. En raison de la croissance démographique et des problèmes climatiques, à partir du IIe siècle, les peuples germaniques commencent à la franchir et à pénétrer dans l’Empire par petits groupes, attirés par des territoires plus fertiles. Certains Germains deviennent des colons ; d’autres font foedus avec Rome, c’est-à-dire qu’ils rejoignent l’armée romaine en tant que fédérés ou alliés. En échange de leur service dans l’armée et de la défense des frontières, les fédérés reçoivent des terres et du bétail.

À la fin du IVe siècle, la présence germanique à l’intérieur des frontières de l’Empire s’accroît. La plupart d’entre eux s’installent dans les campagnes et, profitant de l’affaiblissement du pouvoir impérial, continuent à avoir leurs propres lois et à être gouvernés par leurs propres chefs. Les Germains conservent leurs coutumes, ne parlent pas le latin et ont une religion païenne ou arienne.
Au début, Rome ne mesure pas les conséquences possibles de la présence germanique au sein de l’Empire, car les peuples ne sont pas unis et les rivalités entre eux sont habilement exploitées par les Romains. Cependant, en raison de sa faiblesse croissante et de ses problèmes internes, l’Empire ne réagit pas à temps lorsque de nouvelles invasions plus violentes se produisent.

Les Goths sont l’un des peuples qui ont pénétré dans l’Empire. Il s’agissait au départ d’un peuple pacifique d’agriculteurs qui vivaient dans des communautés rurales et se déplaçaient individuellement à l’intérieur des frontières de l’Empire romain. La migration des Goths était due à la pression exercée par les Huns à l’est et n’était pas agressive à l’égard des Romains ; elle ne s’est produite que lorsque les Goths ont été maltraités et opprimés par les Romains alors qu’ils traversaient le Danube.

En 382, les Goths concluent un foedus avec Théodose Ier, mais l’interprètent comme une négociation personnelle avec lui plutôt qu’avec le gouvernement romain. Alaric Ier, roi des Wisigoths après la mort de Théodose, a conduit son peuple dans une rébellion au cours de laquelle il a pillé la péninsule balkanique jusqu’à ce que l’Empire d’Orient lui accorde une colonie dans la préfecture d’Illyrie en 398. Le chef gothique peut ainsi approvisionner son peuple en armes et, face à la réaction anti-gothique du gouvernement constantinopolitain, il envahit en 401 la préfecture d’Italie où il est vaincu par Stilicon le 6 avril 402 à Pollentia, puis à Vérone. Il signe alors une paix éphémère avec Honorius au cours de laquelle Stilicon cherche à s’allier avec lui pour arracher la préfecture d’Illyrie à l’Empire d’Orient.
L’empereur ordonne la mort de son général en 408 et la nouvelle situation créée permet aux Wisigoths d’envahir à nouveau l’Italie et même d’assiéger Rome. Il demande alors à l’empereur Honorius d’être nommé général des armées de l’Empire, ce qui ne lui est pas accordé. Il retourne donc à Rome, qu’il met à sac pendant six jours en août 410, emportant comme butin la sœur de l’empereur, Galla Placidia. Après le sac de Rome, il se dirige vers le sud de l’Italie pour s’assurer un passage vers l’Afrique. Mais il mourut et son successeur, Athaulf, se dirigea vers la Gaule où, en 414, il établit un régime gothique avec pour capitale Narbonne, où il épousa Gala Placidia et proclama sa politique de maintien du nom de Rome par la force des armes gothiques. Mais il est assassiné et son successeur Walia échoue dans une tentative de passage en Afrique. Finalement, en 418, un accord avec les Romains lui assure une implantation dans le sud-ouest de la Gaule et le nord-est de l’Hispanie, entre la Garonne et la Loire.

La veille du Nouvel An 406, une grande coalition de peuples germaniques, principalement des Vandales, des Suèves et des Alains, traverse le Rhin, franchit les positions défensives romaines, s’empare de villes dans le nord de la Gaule et progresse vers le sud-ouest. En 409, les villes d’Aquitaine sont menacées et la coalition envahissante poursuit sa marche à travers les Pyrénées en direction de l’Hispanie. En quelques années, les barbares construisent des royaumes qui se disputent les meilleures terres et dépossèdent et dispersent les propriétaires romains.
Dans le même temps, des troubles locaux en Grande-Bretagne et des incursions saxonnes le long de la côte provoquèrent une série de proclamations impériales, à la suite desquelles l’usurpateur Constantin III pénétra en Gaule, installa sa cour à Arles et étendit bientôt son pouvoir à l’Hispanie. Cela coïncide avec l’invasion d’Alaric, de sorte que le gouvernement romain ne peut pas faire grand-chose pour lutter contre cette usurpation de la Gaule. Après la proclamation de Constantin III, la Britannia fut gouvernée par des roitelets locaux qui continuèrent plus ou moins le pouvoir romain, et à partir du milieu du Ve siècle, elle fut progressivement occupée par les Saxons venus de l’Est.

En Gaule, l’Armorique et une grande partie de la région centrale de la province sont contrôlées à partir de 410 par des insurgés connus sous le nom de Baccaudi ou par des enclaves germaniques établies localement.

En 429, les Vandales quittent l’Hispanie pour l’Afrique et, en l’espace de quelques années, se rendent à Carthage. Une expédition envoyée de l’Est oppose une certaine résistance à l’avancée des Vandales, mais en 435, la partie orientale de la Mauritanie, la Numidie et, deux ans plus tard, Carthage tombent.
En 420, les Huns s’installent dans les plaines hongroises au nord du Danube. De là, ils commencent à pénétrer sur le territoire romain, menaçant la route terrestre entre l’Est et l’Ouest qui, au IVe siècle, constituait l’épine dorsale de l’Empire ainsi que l’accès traditionnel aux zones de recrutement. En 430, le gouvernement romain conclut une série d’accords avec le roi hun, Rugila, prévoyant le versement de subventions, un pacte qui sera maintenu avec ses successeurs, Bleda et Attila. En 441, la guerre ouverte éclate, Attila prend les villes de Sirmium, Margus, Naissus et Philippopolis. Elle se termine en 449 par une augmentation des subsides et l’évacuation par les Romains des territoires situés sur les rives du Danube.

Après un accord avec la cour de Constantinople, Attila avance en Gaule, mais il est vaincu dans les champs de Catalogne par les forces combinées des Romains, des Wisigoths et des Burgondes. Il décide alors d’envahir l’Italie : il met à sac Aquilée, Milan et Ticinum. Mais Attila s’arrête au Pô, où une ambassade est envoyée par le préfet Trigetius, le consul Avienus et le pape Léon Ier, entre autres. Après la rencontre, il commença sa retraite sans revendiquer les territoires qu’il voulait.
De nombreuses explications ont été avancées pour expliquer ce fait. Il se peut que les épidémies et les famines qui ont coïncidé avec son invasion aient affaibli son armée ou, plus probablement, que les troupes que Marcien, empereur d’Orient, a envoyées de l’autre côté du Danube l’aient contraint à revenir, se retrouvant coincé en Italie, sans soutien naval et avec une armée ennemie à ses trousses. Selon d’autres versions, c’est la crainte superstitieuse du sort d’Alaric Ier, mort peu après le sac de Rome en 410, qui aurait poussé les Huns à s’arrêter. La légende veut que ce soit saint Léon le Grand qui ait réussi à chasser Attila de la péninsule. Attila mourut finalement en 453, entraînant avec lui la puissance des Huns.
La dynastie de Théodose en Occident prend fin avec l’assassinat de Valentinien III en 455, auquel succèdent plusieurs empereurs éphémères. Après le règne de Libius Severus, placé par Flavius Ricimerus qui était le véritable souverain, l’empereur d’Orient, Léon provoqua l’installation en Occident d’Anthemius. Alors que Ricimerus et lui étaient sur le point de s’affronter, Léon les réconcilia par l’intermédiaire d’Anitius Olibrius, sénateur occidental exilé à Constantinople. Mais Antemius est assassiné et Anitius Olibrius devient empereur. Après sa mort quelques mois plus tard, le gouvernement oriental envoie Julius Nepos pour remplacer le successeur de Glycerius Olibrius, Glycerius. Nepos est évincé par le général Oreste, qui élève son propre fils, Romulus Augustus, sur le trône impérial. Comme Romulus Augustule n’a jamais été reconnu par le Sénat, et que c’est principalement de cette manière que les historiens ont reconnu les empereurs légitimes parmi l’enchevêtrement des prétendants, certains pensent que le dernier empereur était, en fait, Julius Nepos.
Dans ce climat d’instabilité politique et en raison de son jeune âge, Romulus ne peut faire face aux soldats rebelles menés par Flavius Odoacer, qui réclament les terres que le père de Romulus, Oreste, leur avait promises en échange du renversement de Népos. Odoacer renverse Romulus et rétablit Népos le 4 septembre 476, obtenant ainsi le titre de doge Italiae. Cette action est traditionnellement considérée comme la fin de l’Empire romain d’Occident, mais la déposition de Romulus n’a pas provoqué de bouleversements significatifs à l’époque. Rome avait déjà perdu son hégémonie sur les provinces ; les chefs de guerre des Foederati avaient reconnu l’empereur d’Orient comme leur empereur en échange de sa légitimation de leurs nouvelles dominations.

Théories sur la chute de l’Empire romain

Il existe de nombreuses théories sur la chute de l’Empire romain. Par exemple, les historiens Végèce (un contemporain de l’époque), Arthur Ferrill et Edward Gibbon ont soutenu que les Romains avaient perdu leurs vertus des siècles passés en laissant la tâche de défendre l’Empire entre les mains de mercenaires qui se sont finalement retournés contre eux.

C’est ce que dit Végèce lui-même dans son ouvrage Epitoma rei militaris :

Tout le livre est caractérisé par la nostalgie de Végèce pour les temps qui l’ont précédé et l’exaltation des gloires passées, déplorant l’abandon dans lequel se trouvait l’armée à son époque, et proposant sa renaissance, en insistant particulièrement sur la nécessité de la discipline et de l’entraînement. Extrait du livre I, chapitre I :
De plus, Gibbon considère que le christianisme a accentué ce processus car la population était moins intéressée par les événements terrestres et attendait une récompense au Paradis. Toutefois, il convient également de noter que les Pères de l’Église de l’époque ont eux-mêmes plaidé en faveur d’une guerre juste dans le cadre de la légitime défense.

Ludwig von Mises a soutenu que l’inflation et le contrôle des prix par les derniers empereurs ont détruit le système économique de l’Empire romain, qui a tout simplement fait faillite, incapable de payer l’armée et provoquant des troubles au sein de la population.

Contrairement aux théories du déclin progressif de l’Empire, Arnold J. Toynbee et James Burke affirment que l’Empire n’a pas pu survivre à partir du moment où son expansion territoriale s’est arrêtée. Ils affirment que l’Empire ne disposait pas d’un système économique stable et que son principal revenu économique provenait du butin capturé lors des campagnes militaires.

Certains historiens pensent que le terme « déclin » n’est pas approprié pour cette période.

Henri Pirenne affirme que l’Empire d’Occident s’est maintenu sous une forme ou une autre jusqu’à l’expansion de l’islam au VIIe siècle, qui a perturbé les routes méditerranéennes et entraîné le déclin de l’économie européenne.

Les historiens de l’Antiquité tardive rejettent l’idée de la « chute » de l’Empire occidental. Peter Heather considère que l’Empire romain s’est transformé au fil des siècles, puisque la culture de la fin du Moyen Âge contient de nombreux éléments de la culture romaine, et met l’accent sur la continuité entre le monde classique et le Moyen Âge.

Causes et conséquences

Les causes traditionnellement avancées pour expliquer la chute de l’Empire romain sont multiples et étroitement liées à la théorie qu’elles servent. Néanmoins, il est toujours possible de mettre en évidence un certain nombre de facteurs qui ont indéniablement contribué à la crise et, en fin de compte, à la chute de Rome. On peut ainsi distinguer une série de causes internes et externes, les causes internes étant celles sur lesquelles l’historiographie contemporaine s’est le plus penchée.
Parmi les causes internes figurent les problèmes de succession du pouvoir, jamais bien résolus, qui dépendent généralement non pas de la coutume ou d’une quelconque loi écrite, mais des dynamiques politiques et conspiratoires qui se développent autour du trône impérial et qui, dès le début de l’Empire, provoquent instabilité et guerres civiles entre les différents aspirants et arrivistes. En outre, le pouvoir civil, traditionnellement représenté par le sénat et la magistrature, s’est trouvé dès le début fortement affaibli. Après l’avènement du principat, le sénat est devenu un corps purement cérémoniel et la magistrature, un corps bureaucratique. Ainsi, toute l’administration civile et, en somme, tout le pouvoir civil et civique, sont devenus dépendants de l’empereur et identifiés à lui, de sorte que toutes les instabilités qui lui sont associées ont des conséquences directes sur la société civile. Étant donné que la succession n’était pas garantie, que le système juridique – le droit romain – était un ensemble de lois de nature civile et non constitutionnelle (et n’offrait donc aucune garantie quant à l’administration du pouvoir, qui était organisée par le droit commun selon le mos maiorum), et que l’établissement de la principauté elle-même avait été le résultat de la mise en place d’un nouveau système juridique, l’établissement de la principauté elle-même n’a pas été sans conséquences pour la société civile, que l’établissement de la principauté elle-même avait violé), et que la principauté de l’empereur elle-même dépendait dans une large mesure de la capacité de l’empereur à se maintenir au pouvoir, toute faiblesse de l’empereur pouvant être exploitée par quiconque avait les moyens de le renverser et de s’emparer du pouvoir.
Cette dynamique est apparue avec la chute de Caligula et de Néron et l’année des quatre empereurs, mais elle a pris de l’ampleur après l’assassinat de Commode et de son successeur légitime Pertinax, élu par le Sénat mais tué par la garde prétorienne dans un véritable coup d’État qui a démontré l’influence de ce corps sur le pouvoir civil. La politique néfaste des Sévères (comme l’habitude de faire des dons extraordinaires à l’armée, ce qui mettait en danger le trône de ceux qui n’en avaient pas les moyens) ne fit qu’accroître la politisation de l’armée et l’habitude de son ingérence dans le pouvoir politique. Ainsi, après l’assassinat d’Alexandre Sévère, une crise s’est déclenchée, au cours de laquelle de nombreux généraux disposant d’un minimum de pouvoir ont décidé de s’emparer du trône par des moyens militaires, en envahissant l’empire lui-même, ravagé par une guerre civile continue au cours du IIIe siècle : la tradition veut qu’à un moment donné, sous le règne de Gallien, il y ait eu jusqu’à 30 empereurs arrivistes, à l’image des Trente Tyrans d’Athènes.
Après l’intronisation de Dioclétien et l’instauration de la tétrarchie, cette dynamique n’est pas totalement enrayée et, en effet, à partir du IIIe siècle, tout général ou chef d’armée constitue une véritable menace pour l’empereur (comme le montre l’assassinat d’Aetius). À un certain moment, la figure de l’empereur n’était plus que celle du chef d’armée, ce qui montrait l’effondrement de l’empire et la fin de ses institutions ; les anciennes magistratures étaient alors devenues des fonctions cérémonielles et des sinécures sans intérêt pratique, et l’administration était entre les mains d’une bureaucratie de cour corrompue et inefficace. En ce sens, il a été suggéré que l’affaiblissement du pouvoir civil pourrait bien être dû à la perte des vertus civiques romaines traditionnelles. Par exemple, il a été souligné qu’à la fin du deuxième siècle, le Sénat était composé principalement de provinciaux qui considéraient la dignité de sénateur comme un titre honorifique et qui ne comprenaient pas l’importance et la responsabilité que les Romains avaient attribuées à cette fonction.

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