Marie-Monique Robin

Marie-Monique Robin (Gourgé, 1960) est une journaliste d’investigation, réalisatrice et écrivain française. Elle a reçu le prix Albert-Londres en 1995 et le prix norvégien Rachel Carson en 2009.

Biographie

Née et élevée à Gourgé (Deux-Sèvres), où ses parents étaient agriculteurs, Marie-Monique Robin a étudié les sciences politiques à l’université de la Sarre (Allemagne) et est diplômée en journalisme du Centre universitaire d’études journalistiques de l’université de Strasbourg. Elle a commencé sa carrière à France 3 Région et a travaillé pour l’agence CAPA de 1989 à 1999 avant de devenir journaliste indépendante. Depuis 1989, il a réalisé une quarantaine de films et remporté une trentaine de prix, dont le Buffon (Festival International du Film Scientifique), plusieurs prix au Festival International du Scoop d’Angers et le FIGRA. Ses films sont le fruit d’une longue enquête de terrain, portant un regard critique sur la situation des droits de l’homme dans différentes parties du monde, notamment en Amérique latine, où il s’est rendu plus de 80 fois. Il a enquêté sur l’utilisation de la coca par les indigènes en Colombie (Mama Coca, 1990), sur la prévention du sida à Cuba (Sida et révolution, 1989) et sur l’implication de l’armée française dans l’opération Condor (Escadrons de la mort, l’école française, 2003). Il a également réalisé plusieurs documentaires en France, comme La rébellion des femmes maltraitées (2000). L’école du soupçon (2005) montre les dérives de la lutte contre la pédophilie. En 2002, il réalise un film sur la recherche scientifique des phénomènes paranormaux (Le sixième sens). Depuis 2004, Robin s’intéresse aux menaces qui pèsent sur la biodiversité et à l’appropriation du vivant par les géants de la biotechnologie (Pirates de la vie, Blé : chronique d’une mort annoncée, 2005, Le monde selon Monsanto, 2008).
Marie-Monique Robin est également l’auteur de plusieurs essais, dont certains ont connu un grand succès (Les 100 photos du siècle s’est vendu à plus de 600 000 exemplaires). C’est l’une des particularités de son travail de recherche : chacun de ses livres décrit en détail les recherches effectuées à l’occasion de ses films et approfondit le sujet.

Ouvrages

Voleurs d’yeux est un documentaire réalisé en 1993 qui traite du problème du trafic d’organes. Le journalisme d’investigation se concentre sur l’Argentine, le Mexique, la Colombie, les États-Unis et l’Europe et met en relation la pénurie d’organes, notamment en Europe, et les cas avérés de trafic d’organes en Amérique latine. D’abord acclamé et primé, le documentaire a ensuite fait l’objet d’une polémique centrée sur l’histoire d’un témoin, un enfant sans yeux. Marie-Monique Robin a reçu le prix Albert-Londres (ainsi que cinq autres prix) pour ce documentaire. Suspendu au moment de la polémique, il a été confirmé par la suite, le jury n’ayant pas trouvé d’intention frauduleuse manifeste.
Entre 1998 et 2000, Marie-Monique Robin a réalisé 100 courts métrages de 6 minutes et écrit une série d’articles sur 100 photographies qui ont marqué l’histoire du photojournalisme au 20ème siècle (Les 100 photos du siècle). L’objectif de la série est de retrouver et d’interviewer l’auteur et les protagonistes ou témoins vivants les plus proches de la scène de chaque photographie sélectionnée. Marie-Monique Robin interviewe ainsi Conrad Schumann, le Vopo berlinois de la célèbre photographie de Peter Leibing, Jane Rose Kasmir, la pacifiste une fleur à la main de la photo de Marc Riboud, ou encore Kim Phuc, la jeune fille brûlée au napalm pendant la guerre du Vietnam. Il a fallu parfois des mois et des recherches minutieuses pour que l’équipe de recherche de l’agence CAPA, avec la complicité des photographes ou de leurs ayants droit, puisse retrouver les protagonistes de ces scènes que la photographie a fait entrer dans la mémoire collective. La série a d’abord été diffusée dans Arte et dans les pages du Figaro Magazine, puis sur une trentaine de chaînes étrangères. Elle a également donné lieu à un livre éponyme.
Le documentaire propose un tour d’horizon des phénomènes dits paranormaux (télépathie, rêves prémonitoires, lévitation, etc.) à travers l’analyse de récits, de témoignages, de croyances ancestrales, d’expériences menées à l’université d’Édimbourg et dans des centres universitaires américains comme Princeton. En donnant la parole aux scientifiques, la recherche propose un « voyage fascinant qui nous invite à transcender la séparation opérée par la pensée occidentale entre l’esprit et la matière », selon les termes du magazine Science et Vie. Diffusé sur Arte et Canal +, La ciencia frence a lo paranormal a ensuite donné lieu à un livre (El Sexto Sentido : Ciencia y Espiritualidad, conçu en collaboration avec Mario Varvoglis). Lors de la diffusion du documentaire, le magazine Le Monde télévisions écrivait : « rejetés par les scientifiques, notamment en France, les phénomènes paranormaux intéressent de nombreux parapsychologues, professeurs et neurologues du monde entier qui tentent de comprendre, à partir d’expériences troublantes, ce qui se passe dans le cerveau lorsqu’une personne entre dans ce qu’ils appellent un « état modifié de conscience » sans chercher à convaincre à tout prix cette étude se concentre principalement sur l’étude des phénomènes observés quotidiennement par ces chercheurs singuliers mais n’apporte pas un regard critique qui permettrait de comprendre pourquoi, en France, voyance rime toujours avec croyance. » Au contraire, des organisations scientifiques et des sites comme AFIS et imposteurs.over-blog.com, qui s’opposent également aux affirmations de l’auteur sur les OGM, ont exprimé des avis très négatifs sur Le Sixième Sens.
Le livre et le documentaire s’appuient sur des recherches montrant les liens entre les services secrets français et leurs homologues argentins et chiliens (DINA). Robin montre comment les méthodes utilisées par les forces de sécurité argentines pendant la guerre sale de 1976 à 1982 et pendant l’opération Condor étaient basées sur les techniques que les forces de sécurité françaises ont enseignées aux forces argentines. Ce film a reçu le prix du meilleur documentaire politique décerné par le Sénat français. De plus, Escadrons de la mort, l’école française a contribué à l’arrestation d’anciens généraux de la dictature argentine. En effet, la réalisatrice parvient à interviewer certains d’entre eux et à obtenir d’importants aveux sur la torture et l’élimination systématique d’opposants politiques. Ces vidéos ont constitué des preuves pertinentes lors de son procès en Argentine.
Le monde selon Monsanto raconte l’histoire de l’entreprise de Saint-Louis. Implantée dans quarante-six pays, Monsanto est devenue le leader mondial des OGM (plus de 90 % des parts de marché), l’entreprise produit également des PCB (pyralène), des herbicides (comme l’agent orange utilisé pendant la guerre du Vietnam) ou encore des hormones de croissance bovine et laitière interdites en Europe. Le documentaire explique que depuis sa création en 1901, l’entreprise a accumulé les procès pour empoisonnement ou contamination, alors qu’elle se présente aujourd’hui comme une entreprise des « sciences de la vie », convertie aux vertus du développement durable. Dans son enquête, la journaliste affirme que « pour imposer son monde OGM, Monsanto a infiltré les principales sphères scientifiques et réglementaires ». Traduits en 15 langues, le livre et le film ont connu un succès international.
Torture made in USA montre comment « la torture est devenue un instrument de la politique américaine dans la lutte contre le terrorisme, tout en soulevant la question de la responsabilité des hauts fonctionnaires de l’administration Bush et de leur poursuite pour « crimes de guerre » ». Les documents et témoignages recueillis dans le film visent à montrer que les mauvais traitements infligés aux prisonniers irakiens dans la prison d’Abou Ghraib n’étaient pas dus à la mauvaise conduite de quelques « pommes pourries » – comme le prétend la version officielle – mais le résultat d’une politique consciente légitimée par l’administration Bush, bien qu’elle ait violé le droit américain et les Conventions de Genève. Le documentaire inclut les témoignages du général Sanchez, ancien chef des forces de la coalition en Irak, de Michael Scheuer, directeur du programme de détention secrète de la CIA, et de Janis Karpinski, commandant des prisons en Irak en 2003 et 2004. Le film explique également que ce programme a suscité des doutes et des résistances au sein du Département d’Etat et du cabinet de Colin Powell. Le film a été diffusé par ARTE en 2011. Il a été soutenu par Amnesty International, Human Rights Watch et l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture.
Notre poison quotidien est un documentaire réalisé en 2010 en coproduction avec Arte et INA France et diffusé pour la première fois au Festival international des programmes audiovisuels (FIPA) de Biarritz. Ce documentaire, et le livre qui l’a suivi, enquête sur les causes de l’augmentation de l’incidence des cancers, des maladies neurologiques, des maladies auto-immunes et des dysfonctionnements sexuels dans le monde occidental au cours des trente dernières années. Basé sur des recherches menées en Asie, en Amérique du Nord et en Europe, et s’appuyant sur de nombreuses études scientifiques et des témoignages de représentants d’agences réglementaires telles que la Food and Drug Administration (FDA) américaine et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), le documentaire montre que la principale cause de l’épidémie est environnementale : elle est due à plus de 100 000 molécules chimiques qui ont envahi notre environnement, et principalement notre alimentation, depuis la Seconde Guerre mondiale. Cette vaste étude reconstitue les processus auxquels sont soumis les aliments, depuis leur culture (pesticides) jusqu’à l’assiette du consommateur (additifs et plastiques). Elle démasque le système d’évaluation et d’approbation des produits chimiques à travers l’exemple des pesticides, de l’aspartame et du bisphénol A (BPA) et démontre qu’il est totalement défectueux et inadapté. Elle évoque également les pressions exercées par l’industrie chimique pour maintenir ce système.
Les Moissons du futur est le troisième documentaire de la trilogie consacrée au monde de l’alimentation, après Le monde selon Monsanto et Notre poison quotidien. S’appuyant sur des témoignages d’experts et d’agriculteurs, elle dresse un état des lieux du modèle agro-industriel : non seulement il ne nourrit pas le monde, mais il contribue au réchauffement climatique, à l’épuisement des sols, des ressources en eau et de la biodiversité, et pousse des millions d’agriculteurs à la marge de la société. Ses recherches montrent que le problème alimentaire peut être résolu en agissant différemment, dans le respect des ressources et de l’environnement, à condition de revoir radicalement le système de distribution alimentaire et de donner aux agriculteurs un rôle de premier plan dans cette évolution.

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